Retrouvailles [Kouki - Reika - Saga] -SUJET CLOS-

La journée avait été longue pour Kouki. Levé à 5 heures du matin pour un interminable shooting, il voyait le soleil pour la première fois de la journée. Ses lunettes noires posées sur son nez et sa casquette vissée jusqu'aux sourcils, il avait eut l'autorisation de son manager de rentrer chez lui à pied. Kouki était après tout devenu un mannequin réputé et il était facile de le repérer.

Il faisait beau pour un mois de septembre, mais le soleil se couchait déjà. Il était à Kabukichou, quartier réputé pour ses bars gays et se promenait tranquillement dans les ruelles, réfléchissant à ce qu'il allait manger ce soir, s'il devait faire les courses ou non, lorsqu'un bâtiment attira son attention. La devanture était soignée, coquette et le néon portait le nom de l'enseigne avec une jolie écriture rouge. Sur la pancarte une silhouette dessinée avec des jambes délicieusement galbées portant des bas et des jarretelles, de quoi laisser sous-entendre la nature de l'endroit. Il y avait également la carte du bar et Kouki décida d'y entrer. Il retira ses lunettes, les glissa sur l'ouverture de sa chemise tout en poussant la porte. Discrètement, il posa un première regard sur l'entrée. Il y avait un petit couloir qui donnait sur le comptoir et s'y avança le coeur battant. Voilà bien longtemps qu'il n'avait pas visité un nouveau lieu. L'endroit semblait calme mais il vit plusieurs personnes passer. Beaucoup avaient des traits efféminées, portant des shorts ultra court ou des pantalons en lycra ultra moulant, des hauts en résille, laissant dévoiler la peau et les tétons.

"Eh bien, quel endroit charmant..." murmura-t-il en s'installant au comptoir.

Il retira sa casquette, passa une main dans ses cheveux pour les remettre en place et appela le serveur.

"Une limonade s'il vous plaît."

Pas d'alcool pour ce soir, du moins pas tout de suite. Il voulait d'abord se remettre de sa journée, ou plutôt de sa semaine sur-chargée.

"Excusez-moi, ça fait longtemps que vous êtes installés ici ?" demanda-t-il en levant les yeux vers le serveur.

Oh, lui aussi avait plutôt belle gueule. Il avait le regard doux et semblait très sérieux sur son travail. Kouki le fixa d'ailleurs un moment avant de s'en détourner pour voir le défilé des catins.

Les cheveux tirés en arrière pour travailler, Reika était adossé au comptoir. Il n'y avait pas grand monde à cette heure, les clients étaient occupés dans les chambres, ils viendraient se désaltérer ensuite. Il en avait assez de cette ambiance, le barman actuel était en train de démissionner et il était de sale humeur, juste impatient que son contrat touche à son terme. Reika était impatient de voir arriver son remplaçant parce qu'en attendant, c'est lui qui faisait les frais de son agacement.

Il séchait des verres, lorsqu'un homme fit son entrée dans la salle. Le châtain posa les yeux sur lui, hochant la tête en entendant sa commande, sautant par dessus le comptoir pour gagner du temps. Il remplit un verre de limonade, rajoutant une rondelle de citron et une paille avant de l'amener à son unique client du moment.

"Excusez-moi, ça fait longtemps que vous êtes installés ici ?"

"Oh oui, le bordel est vieux. Yoshiki, le proprio' était lui même employé avant de récupérer l'établissement. C'est la première fois que vous venez?"

Il avait du mal à comprendre comment on pouvait pousser la porte du Velvet pour la première fois. Il n'y avait aucun moyen de se tromper sur le genre de services proposés par l'établissement lorsqu'on arrivait. Qui avait envie de payer pour du sexe? Enfin... Lui semblait davantage intéressé par le bar pour le moment... Mais il ne comprenait pas, malgré tout... Cet homme était vraiment beau en plus, il était sûr qu'il pouvait avoir n'importe qui, s'il le désirait...

Des employés du bordel allaient et venaient dans le bar, prenant un verre entre deux passes. Du coin de l'oeil, Reika aperçut Uruha, ce dernier remontant rapidement, puis Saga, avec le nouveau.

Le jeune homme lui tendit rapidement son verre et Kouki le rapprocha de lui, touillant la boisson avec la paille avant d'en siroter une gorgée, tournant sur son tabouret pour essayer de comprendre un peu mieux l'ambiance du lieu.

"Oh oui, le bordel est vieux. Yoshiki, le proprio' était lui même employé avant de récupérer l'établissement. C'est la première fois que vous venez?"

"Oui, je n'ai pas toujours l'occasion de sortir de chez moi librement. Pour la première fois depuis des lustres on m'a autorisé à me promener et j'ai pris le parti de marcher dans des ruelles que je ne connaissais pas." expliqua-t-il en posant un coude sur le rebord du comptoir.

D'un côté un blond était collé au mur, flirtant avec un businessman à la calvitie naissante. A côté, une femme au décolleté affreusement plongeant et aux faux-cil d'une longueur ridicule semblait appréciait la main qui se faufilait entre ses cuisses. Mouais, rien de bien intéressant pour Kouki. Il trouvait rarement un femme joli, et l'homme était trop grand pour apercevoir le visage du blond. Il tourna alors la tête de l'autre côté, là où se trouvait l'escalier principal pour accéder aux chambre. Une première silhouette apparue, un rouquin aux longs cheveux ondulés à la bouche finement dessiné. Il avait un visage des plus androgynes et le corps mince. Sa chemise - trop grande pour lui - était complètement ouverte, laissant apercevoir un bout de téton rose et était accompagné d'un short court qui laissait une superbe vue sur ses cuisses. Ce type devait avoir un succès monstre auprès des clients et vu le sourire satisfait qu'il affichait en permanence, il devait se sentir comme un poisson dans l'eau.

"Mhmm, mais c'est qu'il y a des gens intéressants. Moi qui m'attendait à voir débarquer des drag-queens et des trans'..." souffla-t-il avant de se redresser sur son tabouret.

Il venait d'apercevoir un visage familier, mais il n'était pas sûr de son coup.

"Dites-moi... Le mec là-bas, derrière le rouquin avec la veste rouge, vous connaissez son nom ?" dit-il subitement en posant son verre à moitié vide.

Non, ça ne pouvait pas être lui... Ce serait un coup du sort énorme de le revoir comme ça.

"Oui, je n'ai pas toujours l'occasion de sortir de chez moi librement. Pour la première fois depuis des lustres on m'a autorisé à me promener et j'ai pris le parti de marcher dans des ruelles que je ne connaissais pas."

"Autorisé? Que faites-vous comme travail pour ne pas pouvoir vivre librement, si ce n'est pas indiscret?"

Le blond avait prit le parti de discuter, alors Reika n'allait pas se gêner pour lui renvoyer l'ascenseur. Il s'ennuyait, de toute façon.

"Mhmm, mais c'est qu'il y a des gens intéressants. Moi qui m'attendait à voir débarquer des drag-queens et des trans'..."

Reika ricana. Il y avait de tout ici, mais Yoshiki tenait à ce que ses employés restent un minimum naturels, ils étaient là pour donner du fantasme, mais pas pour être des poupées gonflables malgré tout. Et il tenait un bar gay, alors il ne voulait pas de travestissement à outrance.

"Dites-moi... Le mec là-bas, derrière le rouquin avec la veste rouge, vous connaissez son nom ?"

Reika se retourna et repéra rapidement Saga, en pleine discussion avec Tsubasa autour d'un verre de bière.

"Ah, oui. C'est Saga, pourquoi, il vous intéresse?"

"Autorisé? Que faites-vous comme travail pour ne pas pouvoir vivre librement, si ce n'est pas indiscret?"

Kouki eut un temps d'arrêt, rare était les gens qui ne le connaissait pas. Il tendit alors une carte de visite et expliqua :

"Je suis mannequin et le succès me sourit. J'ai des contrats à la pelle et rarement une minute à moi du coup. Je vous donne ceci, histoire que vous vous fassiez une idée de mon travail. Juste, gardez-là pour vous, je suis assez chargé comme ça, pitié..." dit-il en basculant la tête en arrière avec une mine exaspérée.

Le serveur se mit ensuite à rire lorsqu'il lui fit part de ce qu'il avait imaginé comme bordel et lui expliqua le concept que Yoshiki avait mit en place. C'était vraiment un endroit à part. Vint ensuite le moment où Kouki remarqua la silhouette de son ancien ami, sans pour autant être sûr de lui.

"Ah, oui. C'est Saga, pourquoi, il vous intéresse?"

"QUOI ?!" cria-t-il en se levant.

Il n'y avait pas trente-six mille personnes qui s'appelait Saga à Tôkyô, surtout avec la même dégaine et le même visage. Il s'approcha et posa une main sur l'épaule du brun.

"Saga, c'est bien toi ? C'est vraiment toi ?"

L'homme se retourna alors, interloqué et Kouki cracha.

"Mais bordel, tu te fous de moi, j'ai cru que t'étais mort mec ! Depuis quand t'es sur Tokyô ?"

Le blond lui tendit alors une carte de visite que Reika attrapa en le remerciant.

"Je suis mannequin et le succès me sourit. J'ai des contrats à la pelle et rarement une minute à moi du coup. Je vous donne ceci, histoire que vous vous fassiez une idée de mon travail. Juste, gardez-là pour vous, je suis assez chargé comme ça, pitié..."

"Oh, je vois... Merci."

Lorsqu'il lui donna le nom de l'homme qu'il avait repéré, le mannequin se leva d'un bond et Reika esquissa un sourire, concluant ainsi que la conversation était terminée. Il repartit vers le bar, laissant son client vaquer à ses occupations.

***

Saga essayait de réconforter Tsubasa. Il n'avait pas encore eu de client mais était terrifié à cette idée et ils discutaient tous les deux lorsque quelqu'un posa une main sur son épaule.

"Saga, c'est bien toi ? C'est vraiment toi ?"

Le châtain se retourna, sa bouche s'entrouvrant lorsqu'il reconnut son interlocuteur. Oh merde, s'il y avait bien une personne qu'il n'avait pas envie de rencontrer ici, dans ces circonstances, c'était bien lui.

"Oh... Kouki... Ca faisait longtemps." murmura-t-il simplement.

"Mais bordel, tu te fous de moi, j'ai cru que t'étais mort mec ! Depuis quand t'es sur Tokyô ?"

"Je suis désolé... Il s'est passé beaucoup de choses... Beaucoup trop. Je suis ici depuis que j'ai quitté la fac."

Il se passa une main dans les cheveux et s'excusa auprès de Tsubasa. Il avait tellement de projets, à l'époque où il était ami avec Kouki... Et maintenant, il le retrouvait là, après toutes ces années, il avait tellement honte de ce qu'il était devenu.

"Oh... Kouki... Ca faisait longtemps." murmura-t-il simplement.

Le mannequin en resta scotché, il était à la fois énervé et tellement heureux de le retrouver. Il ne remarqua même pas le garçon assis à côté de lui.

"Je suis désolé... Il s'est passé beaucoup de choses... Beaucoup trop. Je suis ici depuis que j'ai quitté la fac."

Son ami s'était levé et Kouki le prit dans ses bras, le serrant aussi fort qu'il pouvait. Rare étaient les personnes à qui il montrait autant d'affection.

"J'ai dit, j'ai cru que t'étais mort putain... Me refait jamais un coup pareil..."

Le temps sembla se suspendre un instant avant que Kouki ne daigne s'écarter.

"Tu finis à quelle heure ? Y'a moyen qu'on se voit aujourd'hui ? Je veux tout savoir de ce qu'il t'est arrivé depuis !"

"J'ai dit, j'ai cru que t'étais mort putain... Me refait jamais un coup pareil..."

"Ca ne risque pas... Je ne pense pas sortir d'ici avant bien longtemps..."

Kouki l'enlaça et le serra contre lui, laissant Saga un peu perplexe. Ca le gênait vraiment, d'être vu ici, par une personne avec laquelle il avait partagé tous ses projets et ses rêves, quelques secrets aussi, avant que sa vie ne bascule.

"Tu finis à quelle heure ? Y'a moyen qu'on se voit aujourd'hui ? Je veux tout savoir de ce qu'il t'est arrivé depuis !"

Saga n'était pas certain d'avoir très envie d'en parler mais il savait que son ami ne lâcherait pas l'affaire comme ça. Et puis, plus vite il l'aurait dégoûté, plus vite il serait seul de nouveau, hein?

"Je n'ai rien à faire là. On peut monter chez moi, si tu veux."

Au point où il en était maintenant, il ne prenait plus trop de risques.

"Ca ne risque pas... Je ne pense pas sortir d'ici avant bien longtemps..."

Kouki le regarda dans les yeux, sans rien dire. Bon au moins, il saurait où le retrouver. Il passa un doigt sur sa joue avant de s'écarter complètement de lui.

"Je n'ai rien à faire là. On peut monter chez moi, si tu veux."

"Ca me va. J'ai enfin terminé mon marathon séance photo et je ne sais pas quand est mon prochain jour de congé. Mais t'es sûr que ça ne pose pas de problème ? Je veux dire, t'es en heure de travail non ?"

Il lui tenait les mains, vraiment inquiet à son sujet et fini par lever les yeux. Le garçon à côté de lui le fixait mais il n'en avait que faire. Il avait enfin retrouvé son vieil ami et il voulait savoir ce qu'il lui était arrivé.

"Vous faites un service restaurant aussi ? Sinon je commande, je paye, qu'on fête nos retrouvailles."

"Ca me va. J'ai enfin terminé mon marathon séance photo et je ne sais pas quand est mon prochain jour de congé. Mais t'es sûr que ça ne pose pas de problème ? Je veux dire, t'es en heure de travail non ?"

Saga retint un soupir. Séance photo? Il avait réussi dans la vie, avait manifestement un travail prenant et bien plus intéressant que le sien. Pourquoi avait-il fallu qu'il vienne ici? Saga avait presque envie de lui demander de partir.

"Ca va... Si je suis sollicité, j'ai un interphone dans ma chambre."

Kouki tenait ses mains dans les siennes et le châtain finit par se dégager, faisant un pas vers sa chambre. Qu'ils en finissent, et vite...

"Vous faites un service restaurant aussi ? Sinon je commande, je paye, qu'on fête nos retrouvailles."

"Heu... Reika fait des pizzas, des burgers et un plat du jour, si tu veux. Aujourd'hui c'est filet de haddock avec frites de patate douce."

Il le laissa commander ce qu'il souhaitait et l'emmena ensuite dans son studio, claquant la porte derrière eux, se laissant tomber assit sur son lit. Ce n'était pas très grand mais il y avait quand même un coin salon, un coin cuisine et une petite salle de bain.

"Ca va... Si je suis sollicité, j'ai un interphone dans ma chambre."

Kouki hocha la tête puis son ami lui lâcha les mains. Il ne semblait pas aussi ravit que lui de le retrouver.

"Heu... Reika fait des pizzas, des burgers et un plat du jour, si tu veux. Aujourd'hui c'est filet de haddock avec frites de patate douce."

Ah oui quand même, sympa. Enfin, les pizza devaient être surgelées, les frites du burgers aussi mais le plat du jour avait l'air sympa. Kouki retourna voir Reika et commanda deux pizzas. Il réinviterait Saga une prochaine fois au restaurant. En attendant qu'elles soient prête, il rejoint son ami dans sa chambre, fermant lui-même la porte derrière lui avant de balayer la pièce du regard. C'était minimaliste mais ça avait l'air confortable. Saga s'assit sur lit, adossé contre le mur, Kouki prenant un coussin dans ses bras avant de s'installer à côté de lui.

"Hey c'est sympa ici, je pensais que t'aurais quelque chose de plus petit et surtout insalubre."

Il détailla un moment la pièce, notant la décoration simple et la basse posée sur le canapé.

"Comment tu vas depuis le temps ? Quand tu es parti, les nouvelles à la télé étaient assez effrayantes et je me suis toujours demandé si tu étais tombé dans des affaires bizarres ou si tu ne t'étais pas fait descendre par une bande de mafieux..."

"Hey c'est sympa ici, je pensais que t'aurais quelque chose de plus petit et surtout insalubre."

"Nan, notre boss est un mec bien, il fait en sorte qu'on ait un minimum de confort."

C'était un peu gênant, de se retrouver avec lui dans sa chambre, après toutes ces années. Jamais il n'aurait pensé le revoir et il aurait finalement préféré que ça soit le cas. Il aurait aimé que Kouki puisse garder de lui le souvenir qu'il avait de leurs années de fac.

"Comment tu vas depuis le temps ? Quand tu es parti, les nouvelles à la télé étaient assez effrayantes et je me suis toujours demandé si tu étais tombé dans des affaires bizarres ou si tu ne t'étais pas fait descendre par une bande de mafieux..."

Il soupira, frottant ses mains l'une contre l'autre.

"J'suis parti de la fac parce que j'ai reçu un coup de fil des flics. Mes parents venaient de mourir dans un accident de la route. J'ai passé presque un an à l'hôpital après ça, j'ai fais une grosse dépression et j'ai galéré à m'en sortir. Maintenant... Je suis là, il faut bien que j'ai un salaire et j'ai totalement foiré mes études avec cette histoire."

On frappa à la porte et Saga se leva, ouvrant à Reika qui apportait les pizzas. Il le remercia et referma, rapportant les assiettes sur le lit.

"Nan, notre boss est un mec bien, il fait en sorte qu'on ait un minimum de confort."

Kouki hocha encore la tête et s'installa à côté de lui, attrapant l'une de ses mains. Quand ils ne jouaient pas dans la salle de musique et qu'il pleuvait dehors, les deux étudiants - à l'époque de la fac - ils allaient chez l'un ou l'autre et passaient des heures à discuter, à regarder un film ou même des lives. Forcément, une chose en amenant une autre, le partage des projets et surtout des secrets les avaient conduit à partager plusieurs nuits ensemble. Et pourtant, ni l'un ni l'autre n'avait parlé de s'engager dans une vraie relation. C'était comme ça, c'est tout.

"J'suis parti de la fac parce que j'ai reçu un coup de fil des flics. Mes parents venaient de mourir dans un accident de la route."

"QUOI ?" hurla-t-il en se mettant à genoux sur le lit. "Merde ! J'ai entendu parlé d'un accident de voiture peu après ton départ, mais je n'aurai jamais fait le lien avec toi..."

Il fixa le sol un instant jusqu'à ce que son ami lui parle de la suite.

"J'ai passé presque un an à l'hôpital après ça, j'ai fais une grosse dépression et j'ai galéré à m'en sortir. Maintenant... Je suis là, il faut bien que j'ai un salaire et j'ai totalement foiré mes études avec cette histoire."

"Oh fait chier Saga... Et à aucun moment tu ne m'as appelé ? J'aurai pu t'aider... Ou au moins... te soutenir..."

Certes, Kouki avait perdu sa mère en vol, mais ça faisait un moment déjà. Son deuil, lui, il l'avait déjà fait. Mais Saga avait carrément fait une dépression. En même temps, il y avait de quoi. Tous les parents - surtout au Japon - n'étaient pas aussi tolérant qu'eux sur l'homosexualité et encore moins sur la décision d'avenir de leurs enfants.

"Je suis désolé Saga..." finit-il par murmurer.

Il était sous le choc, mais Saga avait vécu bien pire, il n'allait pas se plaindre.

"Passe-moi ton numéro, dès que j'ai un moment de libre et que ça coïncide avec toi je passe te prendre, histoire de se remémorer les bons souvenirs. Ca te dit de se refaire des séances musique aussi ?"

"Oh fait chier Saga... Et à aucun moment tu ne m'as appelé ? J'aurai pu t'aider... Ou au moins... te soutenir..."

"J'étais pas vraiment dans l'état d'appeler qui que ce soit, tu sais... Et surtout, j'avais besoin d'être seul."

"Je suis désolé Saga..."

"C'est bon, j'ai finis par faire mon deuil."

"Passe-moi ton numéro, dès que j'ai un moment de libre et que ça coïncide avec toi je passe te prendre, histoire de se remémorer les bons souvenirs. Ca te dit de se refaire des séances musique aussi ?"

Ah bon sang... Il ne pouvait pas simplement le laisser tranquille? Saga n'avait pas envie de voir Kouki tous les jours, pour qu'il lui rappelle à quel point ils avaient perdu du temps, à quel point la vie, dehors, était plus sympa que celle qu'il vivait ici... Il avait prit l'habitude d'être seul, de jouer de la musique seul. Il ne voulait pas se remémorer de bons souvenirs.

"Franchement... Non, pas vraiment. Je crois que c'est derrière moi tout ça et que je n'ai pas besoin de me replonger dans le passé. Merci d'être passé, mais je pense que je vais retourner travailler."

Il était peut-être un peu froid mais il ne voulait pas laisser son ancien ami reprendre trop de place dans sa vie. La fac, les projets, tout ça, c'était loin.

"J'étais pas vraiment dans l'état d'appeler qui que ce soit, tu sais... Et surtout, j'avais besoin d'être seul."

"Oui, oui je sais. J'veux dire... J'imagine bien que t'étais pas en état..."

"C'est bon, j'ai fini par faire mon deuil."

Kouki resta dubitatif mais n'insista pas sur ce point, préférant essayer de renouer avec son ami.

"Franchement... Non, pas vraiment."

Le sourire de Kouki s'effaça aussitôt. Il avait l'impression de s'être fait violemment giflé.

"Je crois que c'est derrière moi tout ça et que je n'ai pas besoin de me replonger dans le passé. Merci d'être passé, mais je pense que je vais retourner travailler."

Le mannequin en resta bouche bée. Il se sentait comme un con. Il s'était inquiété pour son ami et maintenant qu'il le retrouvait il se faisait littéralement jeté.

"T'es pas sérieux là ?" lâcha-t-il en se levant. "C'est quoi le problème ? Comme je ne fais plus partie de ta vie depuis, ça ne t'intéresse pas ? On n'est plus des gamins alors garder contact, tu t'en branles ?"

Il se dirigea de lui-même vers la porte.

"Mais qu'est-ce qu'il t'es arrivé bon sang ? T'étais pas aussi froid et distant..."

"Mais bon sang, Kouki, je suis obligé de me prostituer pour vivre ! Est ce que tu peux comprendre ça? Désolé d'avoir du mal à te voir débarquer avec ton boulot, ta vie bien rangée et les souvenirs que tu remues! J'ai pas besoin qu'on me rappelle à quel point j'ai foiré ma vie."

"Mais j'en ai rien à foutre que tu sois devenu pute Saga. Je m'en branle totalement." hurla-t-il en frappant du poing contre le mur. "En revanche, te savoir en vie, ça, ça compte. Du moins, pour moi ça comptait... Putain, j'aurai jamais cru que tu pourrais me faire un truc pareil..."

Kouki avait beaucoup d'ami, plus ou moins proches. Avec le temps, forcément, il en avait perdu beaucoup de vue, chacun était parti de son côté pour réaliser ses rêves et ses projets. Lui, il avait juste réussi à obtenir son diplôme mais ne savait pas encore quoi faire exactement de sa vie jusqu'à ce que quelqu'un le remarque dans la rue. Bref, tout était allé très vite après ça.

"Tu penses vraiment que je suis venu pour te rabaisser ? T'es con ou te le fait exprès ?"

Il préférait partir avant de s'énerver pour de bon, en général, ça ne présageait rien de bon. La porte claqua bruyamment et Kouki dévala les escaliers.

"Fait chier, putain..."

"Mais j'en ai rien à foutre que tu sois devenu pute Saga. Je m'en branle totalement. En revanche, te savoir en vie, ça, ça compte. Du moins, pour moi ça comptait... Putain, j'aurai jamais cru que tu pourrais me faire un truc pareil..."

Saga sursauta. Ah oui, évidemment, ça ne lui avait pas vraiment plu. Mais à quoi il s'attendait? Il ne pouvait pas débarquer comme ça et faire comme si rien n'avait changé.

"Tu penses vraiment que je suis venu pour te rabaisser ? T'es con ou te le fait exprès ?"

"Que tu le fasses ou non, ça revient au même... C'est mon ressenti, c'est tout..."

il se rabaissait tout seul, il n'avait pas besoin d'aide.
Kouki claqua la porte, ressortant de chez lui sans demander son reste et Saga s'allongea sur le lit en soupirant. Il n'avait vraiment pas besoin de ça en plus du reste...

"Salut Reika. Une limonade aujourd'hui aussi. Oh, et tiens, je suis désolé, je suis parti sans payer la dernière fois. Tu peux garder la monnaie en guise d'excuses."

Reika releva la tête à ces mots, reconnaissant le mannequin qui lui avait donné sa carte hier. Il esquissa un sourire.

"Ah bonjour... Kouki, c'est bien ça?"

Il avait fait un tour sur son site internet et avait retenu son nom. Il écarquilla les yeux en voyant le billet de 5000 yens sur la table, hésitant avant de le prendre, tout en faisant sa limonade.

"Hum... Sur 5000 yens ça fait quand même beaucoup de monnaie..."

Le mannequin insista cependant et Reika finit par encaisser le billet, glissant la monnaie dans sa poche en le remerciant.

"Rah merde, je suis frustré... Tu peux rajouter un peu de vodka dans mon verre s'il te plaît ?"

"Ah heu oui... Un souci? Vous avez pu parler à Saga hier? J'ai eu le sentiment que ça vous tenait à coeur."

Il récupéra son verre et y versa un trait de vodka.

"Ah bonjour... Kouki, c'est bien ça?"

Kouki hocha la tête avant de s'asseoir sur un tabouret en face de Reika.

"Hum... Sur 5000 yens ça fait quand même beaucoup de monnaie..."

"T'inquiètes pas pour ça, t'auras qu'à m'inviter la prochaine fois."

Il lui adressa un sourire avant de boire une gorgée de sa limonade. Ouais, nan, il avait pas envie de sucre. Il lui fallait quelque chose de plus fort. Il laissa le serveur remplir de vodka et touilla avant de boire au verre.

"Oh mon dieu, ça fait tellement longtemps que j'ai pas eu de jour de congé... Je ne sais même pas quand sera le prochain..."

"Un souci? Vous avez pu parler à Saga hier? J'ai eu le sentiment que ça vous tenait à coeur."

"Cet enfoiré m'a jerté de sa chambre. Sérieusement, je l'ai pas vu depuis... quoi... trois ans..." Il afficha une mine dégoûté et se laissa tomber en arrière tout en se retenant au comptoir. "Et parce que monsieur a fait une dépression et ne veut pas se remémorer le passé, il ne veut pas renouer avec moi."

Il termina son verre d'un trait et en redemanda un autre, sortant un paquet de cigarette de sa veste.

"Ah zut, j'ai oublié mon briquet..." Il palpa ses poche, une clope à la bouche avant de soupirer, jetant sa cigarette sur le comptoir. "Tu finis à quelle heure Reika ? Ca te branche un dîner avec moi ?"

"Cet enfoiré m'a jerté de sa chambre. Sérieusement, je l'ai pas vu depuis... quoi... trois ans... Et parce que monsieur a fait une dépression et ne veut pas se remémorer le passé, il ne veut pas renouer avec moi."

"Ah... Oui, il a un caractère un peu particulier. Je suppose qu'il a du changer, depuis l'époque où vous le connaissiez... Peut-être qu'en lui laissant un peu de temps..."

Il lui demanda un second verre et Reika prépara le même mélange, une seconde fois, regardant le mannequin sortir une cigarette.

"Ah zut, j'ai oublié mon briquet..."

Reika en sortit un de sa poche et le lui tendit, en même temps que son verre.

"Tu finis à quelle heure Reika ? Ca te branche un dîner avec moi ?"

"Que... Pardon?"

Heureusement, il avait déjà posé le verre, sinon celui ci serait sans doute tombé. Un dîner? Mais pourquoi il l'invitait à dîner? C'était un peu étrange...
Et en même temps, Reika avait très envie de sauter sur l'occasion. Kouki devait bien gagner sa vie, lui n'avait jamais mangé dans un restaurant plus haut de gamme qu'un kaitenzushi et partager une soirée avec un homme comme lui, ça ne pourrait pas lui déplaire.

"Heu... Je finis à 21h. Ca serait avec plaisir." répondit-il finalement en s'inclinant.

"Ah... Oui, il a un caractère un peu particulier. Je suppose qu'il a du changer, depuis l'époque où vous le connaissiez... Peut-être qu'en lui laissant un peu de temps..."

Reika lui tendit un verre et un briquet et Kouki put allumer sa cigarette, tirant une bouffée en soupirant de satisfaction. Bon sang, même ses épaules lui faisaient mal. Le briquet reposé sur le comptoir pour que le serveur puisse le récupérer, le mannequin se frotta le front, recrachant encore de la fumée avant de boire.

"Particulier tu dis ? Faudra que tu me donnes plus de détails, histoire que je retourne l'emmerder. Je peux pas le laisser tomber comme ça. Il est mignon à me sortir que ça lui plaît pas d'être prostitué, mais j'ai rien avoir là-dedans. Mais oui, j'imagine qu'il faut que je lui laisse le temps."

Mais Kouki était du genre impatient. Il détestait attendre et prendre son temps.

"Alors Reika, le dîner, ça te tente ?"

Le jeune semblait hésiter, il avait marqué un temps d'arrêt, surpris par la proposition de Kouki. Le mannequin était du genre direct, et quand il trouvait quelqu'un d'intéressant, il n'hésitait pas à y aller franchement.

"Heu... Je finis à 21h. Ca serait avec plaisir." répondit-il finalement en s'inclinant.

"Quoi, sérieux ? T'acceptes ? Merde, je pensais que t'allais me jeter aussi !" Il éclata de rire et termina son verre. "Bon, je repasse te chercher ici ce soir alors... A tout à l'heure."

Il écrasa sa cigarette sur le cendrier et jeta un autre billet - il tomba sur deux billets de 1000 yen cette fois-ci - et remit ses lunettes et son chapeau avant de partir.

"Particulier tu dis ? Faudra que tu me donnes plus de détails, histoire que je retourne l'emmerder. Je peux pas le laisser tomber comme ça. Il est mignon à me sortir que ça lui plaît pas d'être prostitué, mais j'ai rien avoir là-dedans. Mais oui, j'imagine qu'il faut que je lui laisse le temps."

"Je ne le connais pas si bien que ça... Mais il a un caractère particulier. Il vient souvent ici, simplement pour discuter avec moi, ou avec un de ses collègues. Je crois qu'il regrette beaucoup d'avoir mit les pieds ici, je pense que se retrouver confronté à son passé comme ça l'a un peu perturbé... Mais si vous vous entendiez vraiment bien, il devrait s'y faire. Laissez-lui le temps..."

"Quoi, sérieux ? T'acceptes ? Merde, je pensais que t'allais me jeter aussi ! Bon, je repasse te chercher ici ce soir alors... A tout à l'heure."

"Eh bien... Vous m'avez pris au dépourvu. Mais ça sera un honneur!"

Le blond lui jeta deux billets -alors même qu'il avait déjà payé sa consommation juste avant- mais Reika ne put pas le rattraper, il était déjà parti. Le serveur soupira et les glissa donc dans sa poche. Il n'allait pas cracher contre un peu d'argent supplémentaire, il en avait bien besoin.
En attendant, Reika avait un rencard, était c'était bien la première fois de sa vie. Mais après tout, discuter avec Kouki serait sans doute intéressant. Lui aussi, avait pensé à devenir mannequin, avant de se heurter à sa mauvaise expérience.

"Je ne le connais pas si bien que ça... Mais il a un caractère particulier. Il vient souvent ici, simplement pour discuter avec moi, ou avec un de ses collègues. Je crois qu'il regrette beaucoup d'avoir mit les pieds ici, je pense que se retrouver confronté à son passé comme ça l'a un peu perturbé... Mais si vous vous entendiez vraiment bien, il devrait s'y faire. Laissez-lui le temps..."

"Ouais, ça lui ressemble bien..."

Kouki soupira, il aurait au moins voulu le voir en dehors du Velvet si ça lui gênait tant que ça. L'accueillir chez lui par exemple, lui préparer à dîner comme il le faisait à l'époque où il partageait la même chambre en internat.

"Eh bien... Vous m'avez pris au dépourvu. Mais ça sera un honneur!"

"C'est bon, je t'invite à un dîner, pas un gala. Pas besoin de mettre autant de forme." dit-il en agitant la main.

Kouki fini par rentrer chez lui et en profita pour le ménage et les courses. Son frigo faisait grise mine après ces jours d'absence et il soupira de contentement en le voyant ainsi remplit. Il prit également un bain, le ménage et les courses l'ayant fait transpiré et c'est les cheveux encore humides et avec des vêtements plus habillé qu'il alla chercher Reika au Velvet.

"Bon Reika, t'es prêt ? Je t'emmène en voiture !"